LE JOURNAL  DE COLETTE …….. AU FIL DU QUOTIDIEN

 1 février 2023                    17 février  2023

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Mercredi 1 février 2023 : San Pedro de Atacama – Iquique :  485 km

Nous voilà repartis pour d’autres horizons.

Le bus nous emmène d’abord à Calama, dans la matinée, en 1h 45. Là nous avons le temps de découvrir la ville car nous repartons à 15h pour Iquique. Le centre est agréable.

Une file de voitures vertes et blanches des « carabineros de Chile», défilent devant nous, toutes sirènes hurlantes. Puis nous découvrons une manifestation, avec ses banderoles.

Hélios interroge des personnes : il y a trop de délinquance depuis que la gauche est passée. C’était mieux au temps de Pinochet…, un autre dit avoir été menacé avec un couteau dans un bus.

Dans les recommandations aux voyageurs, il est fortement conseillé de s’éloigner des attroupements.

Mais Hélios veut comprendre, voir de près, moi je préfère m’éloigner…et nous ne sommes pas d’accord ! Ce qui est rare…

Un petit resto et nous voilà repartis pour 5h de bus.

Tout au long de cette route, c’est un paysage désertique, sans même quelque touffe d’herbe. Incroyable !

La même couleur marron, du sable ou peut-être de la roche avec toutes sortes de reliefs.

Et le plus étonnant est l’arrivée dans la ville d’Iquique. D’une falaise, jaillit une ville en bord de mer ! le spectacle est saisissant ! nous n’en croyons pas nos yeux !

Un taxi nous emmène à notre appartement. Carolina nous accueille. Nous nous installons, partons en reconnaissance aux alentours.

Jeudi 2 février 2023 : Iquique

Iquique compte environ 200 000 habitants, se trouve sur la côte pacifique et fait partie du désert d’Atacama.

Iquique signifierait : rêver et se reposer. C’est justement ce à quoi nous allons nous employer !

Dans la mesure du possible, nous choisissons des locations d’appartement, avec une kitchenette, afin de mieux pouvoir manger à notre goût. Aussi nous allons faire nos courses et cuisinons.

Notre logeur nous lave notre linge.

Les gens sont vraiment très serviables, lorsque nous leur demandons des renseignements. Aujourd’hui une femme nous a aidé à installer une application pour nous faire transporter par des taxis à moindre prix.

Ainsi, nous allons à l’office de tourisme, au centre-ville puis revenons à pied chez nous en longeant la baie. Les vagues sont impressionnantes. Elles font le bonheur des surfeurs.

Il fait très chaud.

Je lis qu’elle est la ville côtière la plus chaude et la plus humide du Chili en été, stimulée par la falaise côtière qui transforme la ville en une véritable marmite, concentrant l’humidité provenant de l’évaporation de la mer !

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Ici une tradition de Noël unique au monde consiste en des caravanes de voitures et de camions avec des décorations de Noël qui se consacrent à lancer des bonbons aux enfants badauds qui les voient passer dans les jours précédant Noël.

Vendredi 3 février 2023 : Iquique

Nous partons profiter de la plage. La densité de population y est très élevée.

La location d’un parasol est indispensable, sous peine de griller.

Quant à l’eau, elle est particulièrement froide, les vagues impressionnantes, si bien que nous ne mouillerons que nos jambes.

Pourtant je suis une adepte de la baignade.

Hélios s’amuse à compter le nombre de marchand ambulant : environ 10 à la minute !

Un défilé constant de sollicitations en tout genre : des boissons et de la nourriture, bien sûr. Mais aussi des jouets pour enfants, des chapeaux, lunettes, vêtements de plage, bijoux, tatouages qui résistent à l’eau…

Chacun crie ce qu’il vend parfois avec un porte-voix, une corne, ou avec un cri spécial pour se différencier des autres.

Bref, c’est la foire, c’est le cirque !

Rêver et se reposer (la signification de Iquique) : ce n’est pas pour aujourd’hui !

Nous observons, amusés, toute cette agitation, mais nous en prenons plein les oreilles !

Ce que nous avons tendance à considérer comme une pollution, je suppose que d’autres trouveraient la plage bien monotone sans toute cette activité.

Le plus amusant : en partant, nous remarquons un panneau interdisant le commerce ambulant sur la plage ! s’il était autorisé, qu’est-ce que ce serait ???

Et pourtant 4 policiers circulent, ce commerce est toléré, mais pas la consommation d’alcool visible, nous les avons vu faire vider des cannettes de bière sur le sable ; alors que les mojitos avec alcool, se vendent à leur insu.

Puis nous allons marcher le long « del Paseo Baquedano », une rue piétonnière emblématique et historique de cette ville, déclarée « zone typique »

De riches familles de la ville ont construit d’imposants bâtiments dans cette rue entre les années 1880 et 1920.

La plupart de ces familles étaient des étrangers, notamment des Anglais et des Américains, qui ont apporté l’architecture de leur pays à Iquique.

C’est l’exploitation du nitrate qui a entrainé dans cette ville, une période de grande expansion, malgré 2 grands incendies et 2 tremblements de terre.

De grandes maisons jumelées, construites en pin de l’Oregon, de style géorgien, adaptées au climat désertique avec des toits-terrasses ombragés et des puits de lumière, bordent tous les côtés de la rue.

La rue est occupée par de nombreux stands d’artisanat, et longée de bars et restaurants.

Pour « rentrer chez nous », nous nous servons de l’application « Indriver ». C’est nous qui fixons le prix standard sur l’application, il accepte ou fait une contre-proposition. Un taxi arrive après seulement quelques minutes d’attente.

Le chauffeur, Vénézuélien, discute beaucoup avec Hélios. Leur entretien est relaté dans la réponse au commentaire de Simone.

Samedi 4 février 2023 : Iquique

Nous nous rendons à la zone franche d’Iquique « Mall zofri ». Elle est connue au Chili et à l’étranger pour son centre commercial, sa grande variété de produits et de marques qui la rend très attrayante.

Les achats effectués dans le centre commercial sont exonérés des droits et taxes dans la limite de 1 375 dollars américains par personne, à condition que les produits achetés ne soient pas destinés au commerce.

C’est le même chauffeur que la veille, Javier, qui nous y emmène et avec lequel nous parlons des envies inassouvies de possession qui incite à la délinquance.

Nous sommes rebutés par l’état de la voirie, par l’absence d’entretien des rues.

Il faut avoir de bonnes chaussures de marche pour compenser tous les dénivelés. Alors, je n’imagine même pas comment peut se débrouiller un handicapé sur fauteuil roulant.

Les chiens sont nombreux et bruyants. Ils font partie du paysage. En Bolivie, un jour, nous avons vu 13 chiens en bande.

Mais nous avons quand même plaisir à découvrir des façons de vivre différentes.

Dimanche 5 février 2023 : Iquique

Nous nous promenons dans la matinée sur la plage Brava. C’est très agréable.

A l’arrière des grosses vagues, nous voyons des phoques. Ils sont visiblement en groupe.

Nous interrogeons des personnes. Ils les appellent « lobos del mar », littéralement : loups de mer.

De nombreux parapentistes se lancent du sommet de la dune-falaise à l’arrière de la ville et atterrissent sur cette plage.

Le Chili est le pays qui a le plus long littoral du monde et qui est aussi le plus sismique

Des tsunamis sont possibles, dus à des tremblements de terre, des glissements de terrain sous-marins ou des éruptions volcaniques. Le dernier date de janvier 2022.

Dans l’après-midi nous retournons flâner dans le centre-ville, ce qui nous fait 3h de marche supplémentaire.

A l’allée, le marché est encore en place, tous les commerces sont dans la rue. Même le barbier !

Lundi 6 février 2023 : Iquique – Arica : 310 km

Nous partons vers d’autres horizons, vers Arica, tout à fait au nord du Chili, à seulement 20 km de la frontière avec le sud du Pérou.

Notre voyage en bus devait durer 3h 45. C’était sans compter sur une panne en cours de route. Une autre compagnie nous prend en charge, moyennant un supplément financier qui nous sera remboursé à l’arrivée.

Mais un pneu de ce nouveau bus éclate et nous assistons au remplacement de celui-ci. Ce n’est pas une mince affaire ! 2 personnes sautent à pieds joints sur la barre de la clé de desserrage pour chaque boulon, et il y en a 10 ! Puis, avec le cric trouver la bonne hauteur pour changer ce pneu.

Bref, nous arrivons 3h après l’heure prévue.

Le  paysage est toujours aussi désertique, nous sommes encore dans le désert d’Atacama.

Un taxi « Indriver » nous emmène à notre nouveau logement air bnb. Il est mignon, nous serons bien.

Nous partons faire nos provisions pour manger. En demandant dans la rue, où se trouve le supermarché, un couple nous y emmène dans leur voiture.

Les gens sont vraiment très serviables.

S’ils nous voient regarder le plan ou chercher du regard, ils viennent vers nous spontanément pour nous renseigner, souvent sans même que nous ayons à demander. Ces attentions à l’autre rendent la vie très agréable. On les sent dans l’humain et ça fait du bien.

Mardi 7 février 2023 : Arica 

Cette ville compte environ 240 000 habitants.

Elle est classifiée comme ayant un climat désertique doux, sans chaleur excessive, surnommée « ville de l’éternel printemps ».

Cependant, elle est aussi connue comme étant l'une des villes les plus arides au monde, selon les mesures de pluviométrie.

Entre 1903 et 1918, (soit presque 15 ans), il n'y a pas eu une goutte de pluie durant 173 mois ! Et à l’époque, on ne parlait pas encore de réchauffement climatique.

Arica est un port important. Il sert de port franc pour la Bolivie et gère une partie du commerce extérieur de ce pays, qui n’a aucun accès à la mer.

Nous avons marché sur l’immense plage et sommes saoulés par le vent.

Malvina notre logeuse, a eu la gentillesse de nous emmener avec son véhicule dans une grande surface, où nous avons fait nos courses pour les jours suivants.

Comme « par hasard », durant le retour elle nous fait part, de ses difficultés existentielles.

Hélios lui dit alors qu’il est psychologue et qu’il peut la déprogrammer de traumatismes par EMDR.

Le soir même, (échange de bons procédés), elle vient pour une séance.

Mercredi 8 février 2023 : Arica 

Dans les discussions, lorsque l’on annonce que nous sommes Français, les gens ont toujours et encore, une réaction d’émerveillement, ils ont des étoiles plein les yeux !

« Vous êtes chez nous, on voudrait aller chez vous ! »

Cela nous fait plaisir et apprécier d’autant plus notre pays.

Nous allons visiter le centre-ville et tout d’abord le port de pêche.

Nous y restons longtemps, captivés, fascinés par les pélicans, les lions de mer et les otaries qui attendent sur les bords, les restes lancés par les pêcheurs.

L’ambiance est laborieuse, chacun s’affaire à sa tâche, mais aussi, joyeuse, rieuse.

Nous sommes sous le charme.

Puis nous visitons la cathédrale San Marco, dont la structure métallique est arrivée en 1875, des ateliers du français Gustave Eiffel et a été assemblée par des techniciens français.

De même, l'ancienne douane a été conçue selon les plans de Gustave Eiffel.

Ses briques portent d’ailleurs le sceau de ses ateliers. La structure métallique de la Douane d’Arica a été amenée par bateau de Paris.

La beauté de ce bâtiment vient de sa parfaite symétrie. Elle est de style néoclassique français et son plan est rectangulaire.

Aujourd’hui, on la nomme Casa de la Cultura. Cette merveilleuse construction est classée Monument Historique National.

Enfin nous montons par le sentier piétonnier, au Morro de Arica, une colline côtière de 130 m de haut, aussi déclarée monument national.

De là-haut, nous avons une vue panoramique sur la ville, les plages et l’océan Pacifique.

Nous trouvons de l’ombre pour manger notre pique-nique.

Sur l’esplanade se trouvent un musée historique et le Christ de la paix.

Enfin nous redescendons déambuler dans le centre-ville avant de rentrer chez nous en taxi.

Jeudi 9 février 2023 : Arica 

A 12 km de la ville, se trouve un groupe de grottes, appelées cuevas de Anzota, d’où l’on peut profiter d’un panorama naturel exceptionnel, d’un circuit de 2,2 km confortable entre grottes, falaises et côte rocheuse.

Jorge, notre taxi man, est venu nous chercher et nous attend durant la visite. Ayant toujours vécu ici, il nous sert de guide en nous donnant maintes informations.

Un casque nous est prêté à l’entrée.

Ces lieux ont été habités il y a 9 000 ans par la culture Chinchorro, un endroit stratégique pour se nourrir des produits de la mer.

Des momies ont été retrouvées, dont le processus de momification est le plus ancien enregistré au monde.

L'endroit était également une zone économique importante pour l'extraction du guano, les excréments des oiseaux, le meilleur engrais naturel, à la fin du XIXe siècle.

Nous ne voulons pas quitter l’océan Pacifique sans avoir réussi à nous baigner.

L’eau est très froide à cause du courant Humboldt, un courant marin de surface qui prend naissance près de l’Antarctique, dont les eaux sont de 7 à 8 degrés inférieur à la température moyenne de la mer.

Aussi Jorge, sur le retour, nous dépose devant une plage dans une anse à l’eau très calme, protégée du grand large. Ainsi nous faisons trempette, sans toutefois y faire de vieux os !

Par contre nous nous brûlons les pieds, sur le sable chauffé par le soleil, et courrons à toute vitesse dans l’eau ! Jorge dit que cela n’arrivait pas quand il était enfant. Avec le dérèglement climatique, l’éternel printemps est-il en train de devenir l’éternel été, comme le pense Jorge ?

Le soir, Malvina, nous offre une bouteille de vin, un Malbec chilien, et nous continuons à échanger sur sa vie et la nôtre.

Vendredi 10 février 2023 : Arica – Putre : 126 km, de 0 à 3 500 m d’altitude

Au terminal de bus, un employé nous fait entrer rapidement sur le quai. Il craint pour nous, étrangers, que nous nous fassions dévaliser. Il apprécie que nous comprenions l’espagnol pour pouvoir nous mettre en garde.

Dans le bus aussi, Roberto est affecté par les agressions qui ont eu lieu. Il compare la situation au Far West. Nous discutons un bon moment avec lui, il mélange l’espagnol et l’anglais, ce n’est pas toujours facile !

Durant le voyage de 3h, nous découvrons des paysages très étonnants : un fond de vallée vert, fertile, avec des montagnes autour, totalement désertiques.

Arrivés à Putré, nous sommes très bien accueillis par Yolanda, notre chambre avec salle de bain est simple et colorée nous disposons d’une cuisine commune, l’essentiel y est.

Sauf le wifi, car il y a eu une tempête orageuse et il faut attendre les réparations.

Nous partons en reconnaissance dans le village. Il y a de nombreux magasins d’alimentation, des tours opérators aussi.

Nous nous renseignons auprès de Nicolas et lui commandons un accompagnement de 3 jours dans le parc national Lauca. Le contrat prévoit une adaptation à nos réactions physiologiques en haute altitude.

Et « comme par hasard », Nicolas est aussi thérapeute familial ; il oriente et développe aussi ses recherches auprès des enfants autistes. Déjà, Hélios se réjouit des échanges que nous pourrons avoir.

La température a très nettement baissé, et même, la pluie, que nous n’avions pas vue depuis 20 jours, fait son apparition en force, en fin de journée.

Une des caractéristiques de ce lieu sont les écarts thermiques très importants entre le jour : de 12 à 20°, et la nuit : de -3 à -25° ! Décidément : « Les jours se suivent et ne se ressemblent pas !»

La température a très nettement baissé, et même, la pluie, que nous n’avions pas vue depuis 20 jours, fait son apparition en force, en fin de journée.

Une des caractéristiques de ce lieu sont les écarts thermiques très importants entre le jour : de 12 à 20°, et la nuit : de -3 à -25° ! Décidément : « Les jours se suivent et ne se ressemblent pas !»

C’est l’été, nous n’avons pas de chauffage mais 6 couvertures à notre disposition. L’hiver ils utilisent des chauffages électriques d’appoint. Notre guide nous dira le lendemain qu’il faisait -3 cette nuit.

Prendre notre douche est une épreuve, surtout que l’eau est à peine assez chaude.

Samedi 11 février 2023 : Putre – parc national Lauca

Le parc national de Lauca est considéré comme le joyau de l’Altiplano (de 3 200 m à 6 300m d’altitude). Cette réserve mondiale de la biosphère est classée au patrimoine mondial de l’Unesco

Comme convenu, Nicolas nous prend dans son 4x4 devant notre logement à 7h du matin. Le courant passe tout de suite très fort entre nous. Notre 1er arrêt se fait devant un lieu dédié à la Pachamama : a Pacheta. Notre guide demande la permission d’entrer dans les lieux. C’est un moment solennel et très respectueux.

Il se confie beaucoup à nous. Il nous dit en avoir éprouvé le besoin dès notre prise en charge. Tout naturellement, nous créons un espace sacré et consacré dans nos partages de valeurs, de notre quête de sens, où chacun se livre en confiance. Une sensation à la fois étrange et « incorporée » d’avoir été guidés.

Puis devant le lac Chungara, avec en arrière-plan le volcan « docteur Sajama », nous marchons en admirant le paysage sublime et les nombreux oiseaux qui peuplent le lieu, les troupeaux de lamas qui paissent tranquillement. Dans cette harmonie ambiante nous nous sentons bercés dans une douce paix.

Plus loin les lagunes de Cotacotani sont aussi une merveille de la nature. Il y a beaucoup d’eau dans ce parc.

Nous prenons notre repas au restaurant. Nos discussions sont très animées dans une écoute attentive, et respectueuse de nos parcours existentiels, avec nos joies et nos peines, nos souffrances et nos résiliences.

Puis nous visitons l’église du petit village de Parinacota habité seulement par 2 familles. Son église est magnifique. Classée monument historique national, elle est un exemple typique d’un syncrétisme réussi, où sous la rude imposition du dogme catholique espagnol avec ses icônes, les communautés indigènes ont su habilement préserver leur identité culturelle et religieuse, au nez et à la barbe des envahisseurs.

L’école a 2 élèves : celui de l’institutrice et de l’inspectrice !

Nicolas nous emmène devant un enclos en pierres sèches finement superposées, el chacu, qui servait à rassembler les vigognes (animaux sacrés), uniquement pour les tondre. Leur laine est de très bonne qualité.

Nous sommes à environ 4 500 m d’altitude. Il fait froid, avec du vent, nous avons mis tous nos vêtements chauds sur nous. J’en ai parfois 6 couches.

Nous voyons aussi des grottes qui ont été habitées autrefois. Elles servaient aussi de lieux d’échanges des produits de la mer vers les terres et inversement, transportés par de longues caravanes de lamas.

Ce fut une journée particulièrement riche en échanges, tant sur le plan personnel que sur les explications des lieux visités.

La chance d’avoir rencontré un guide super documenté sur les composantes géographiques, historiques, anthropologiques et géopolitiques, de cette région andine. Nous faisant également partager sa passion par la communauté Aymaras, dans laquelle il s’y enracine depuis 14 ans, et dont les membres auprès desquels il a su acquérir leur confiance, lui transmettent par voie orale, rites, traditions, secrets, technicités pour survivre dans ces hauts plateaux arides et hostiles.

Dimanche 12 février 2023 : Putre – parc national Lauca

Départ à 6h du matin pour un trekking, à partir de la laguna Casiri Ambra à 4 400 m, vers El Torro à 4 600 m.

Je sens mon corps à rude épreuve, à composer avec la raréfaction d’oxygène. Le cœur bat vite pour compenser. J’envisage d’attendre en bas, le retour de Nicolas et Hélios qui supporte mieux que moi. Mais notre guide me donne des conseils : me concentrer sur la respiration, la façon de me servir des bâtons qu’il nous a prêtés…

Nous faisons de nombreuses pauses à discuter, pour récupérer physiquement.

Mais là aussi je me sens à la limite de mes possibilités, à écouter de toutes mes oreilles pour comprendre les échanges en espagnol. Je constate que je comprends mieux qu’hier et je commence à plus participer et m’exprimer.

Nous rencontrons 2 fois 2 français dans cette petite ascension et bien sûr les discussions vont bon train.

Au sommet, nous mangeons notre pique-nique bien conçu pour pallier aux efforts et une boisson énergisante complète le repas.

Sur le retour, nous allons nous baigner dans les termes de Jurasi. Et là le corps peut se relaxer. Quel bonheur ! Cependant, les discussions ne faiblissent pas et avec un autre guide, les efforts d’attention continuent.

Je sens les limites de mes capacités d’adaptation, tant physique (altitude, température) qu’intellectuelle.

Comme la veille, impossible de nous connecter à Internet et c’est assez frustrant. En effet, nous avons plaisir et cela fait aussi partie de notre équilibre, de nous sentir en lien avec la famille et les amis.

Nous aurions aussi besoin de réserver le prochain logement et d’approvisionner notre compte !

Lundi 13 février 2023 : Putre – parc national Lauca

Notre guide vient nous chercher à notre logement. Il nous a réservé notre hôtel pour notre prochaine étape. De plus, Nicolas va nous emmener à la frontière Chili-Bolivie et l’hôtelier va venir nous y chercher !

"Tu es notre Messie Nicolas !" "Vous aussi, répond-il, car, nos échanges, « un marathon psychologique » vont me permettre de naitre à une nouvelle vie".

Nicolas a modifié le programme de visite. Avec la pluie, nous risquerions de nos embourber là où nous devions aller, aussi nous allons visiter 3 villages typiques de la communauté Aymara :  Belen, Chapiquina, et Socorama.

Ces villages sont très isolés, dans la précordillère des Andes, à environ 3300 m d’altitude. Là encore, je trouve leur église très belle par leur simplicité, leur toit recouvert d’herbes, le clocher est posé à côté, indépendant. Les gens étant petits, les maisons sont basses, les ouvertures petites pour éviter les déperditions de chaleur.

Ils cultivent une variété de maïs millénaire, des pommes de terre et des haricots sur des terrasses en espalier et pratiquent la rotation des cultures. Des canalisations leur permettent l’arrosage.

Les écoles, décorées de peinture ne sont plus en service. Ces villages sont occupés majoritairement par des personnes âgées.

Ces communautés vivaient en clan et actuellement les jeunes émigrent vers les villes.

Le carnaval est ici une grande fête qui dure 7 jours. A cette occasion, toutes les familles se réunissent, chacun participe à l’organisation et financièrement. La course du coq en est l’un des rituels

A Belen, la population se sent plutôt espagnole et des tensions existent à ce sujet dans leurs relations. D’ailleurs, pour nous en parler, notre guide parle doucement, comme s’il craignait d’être entendu.

Les espagnols ont détruit la culture de ces communautés et imposé la leur. Ce fut un véritable génocide. Les conséquences sont encore là.

Nicolas nous présente un ami, Germain, médecin généraliste qui, par un roulement de thérapeute, se partage professionnellement entre 2 communes. Le courant passe d’entrée entre nous. Nous nous sentons accueillis, « aimés » et nos échanges sont dans la continuité d’avec Nicolas ; ils se considèrent comme des frères.  Un condor passe à ce moment-là.  Hyperconnectés à leur environnement, pour eux, c’est un signe !

De villages en villages, nous nous imprégnons de leur histoire, de leurs traditions. Tout est calme, là, dans cette douceur environnante, un troupeau de mouton traverse le village. Le berger d’un certain âge, connait notre guide, il vient échanger avec nous, parle quelques mots en français, Il nous raconte son élan d’amour pour une française ; en partant nous nous congratulons de joie spontanée partagée.

Mardi 14 février 2023 : Putre

Une journée de repos est bienvenue.

Dans la matinée nous mettons à jour nos écrits que nous transfèrerons sur le blog lorsque nous aurons une connexion internet.

Nous avons parlé avec notre guide de notre formation en cours, de chamanisme, pour pouvoir ajouter cette pratique de guérison aux soins psychologiques.

Le chamanisme est une pratique millénaire qui s’exerce sur tous les continents et qui, sans échanges entre eux, se rejoignent par des symboles universels, qui font partie de l’inconscient collectif.

Nicolas connait très bien le chaman du village et nous propose de nous le faire rencontrer. Nous lui en sommes très reconnaissants.

Nous leur offrons le restaurant ce jour.

Teofilo est un chamane curandero, qui soigne selon les enseignements Aymara. Âgé de 69 ans, il pratique la médecine traditionnelle depuis 35 ans. Il a fait l’objet d’une reconnaissance médiatique sur ses dons de « mirador de coca ». Le musée de la coca de La Paz, en fait état.

Il nous raconte sa vie durant le repas : orphelin à 4 ans, à 8 ans il commence à travailler. Il a été boulanger puis boxeur professionnel. A l’armée, on le refuse car il a un problème de pulsations cardiaques.

Il se guérit en vivant en altitude. Une de ses tantes lui enseigne la médecine Aymara, durant 14 années. Il nous parle de certains rituels, dont celui de la foudre, qui lui est tombée par 2 fois, juste à côté : confirmation du don.

Il a été sélectionné pour la mise en œuvre du parc national de Lauca et a suivi des enseignements universitaires dans tous les domaines spécifiques, concernant le lancement du parc.

Il a été aussi guide touristique.

Puis il lui tient à cœur de nous recevoir à son cabinet. Nous lui demandons s’il pense que nous sommes aptes à poursuivre notre enseignement chamanique.

Après une oraison à travers laquelle il interroge, il obtient la réponse qu’il nous transmet « énergétiquement » à l’un puis à l’autre ; enfin, il vérifie à travers des feuilles de coca. L’instant est solennel et émouvant.

Oui, nous pouvons exercer, autant l’un que l’autre, ensemble ou séparément.

Nous recevons cette réponse avec beaucoup d’émotion et de gratitude.

C’est notre cadeau de la Saint Valentin.

Il nous propose de rester en lien, et de le solliciter à distance en cas de besoin, il sera présent pour nous guider, au même titre qu’une Italienne qu’il a formée lui-même.

Sincèrement MERCI Téofile, pour ta générosité de cœur.

Mercredi 15 février 2023 : Putre - Sajama

Comme prévu, Nicolas vient nous chercher à 9h et nous emmène à la frontière bolivienne à 70 km.

Nos échanges sont encore très riches. Nous nous quittons en pleurant d’émotion.

Eliseo, notre nouvel hôtelier arrive et nous attend pendant que nous faisons les formalités de passage du Chili à la Bolivie.

Puis nous changeons nos restes de pesos chiliens en bolivianos, sous une toile de marché en plein air, du troc en direct sans aucune transaction écrite ; puis faisons recharger nos chips pour avoir internet illimité, sur nos 2 téléphones portables.

Enfin, nous descendons sur le village de Sajama, non loin de là.

Dans nos discussions, en route, nous découvrons qu’il ne sera pas possible de payer Eliseo par carte bancaire. Et il n’y pas de banque dans ce petit village !

A Putré, il y avait une banque, mais pas de délivrance d’argent avec notre carte visa.  C’est la première fois que nous avons ce problème.

Heureusement, nous avions une réserve de liquidités et avons pu composer, car l’hôtel et notre guide ont accepté les paiements par visa.

Sauf que maintenant, nous sommes coincés ! Et pourtant il va bien falloir trouver une solution !

Nous retournons ensemble toutes les possibilités, car à l’arrivée un virement sur son compte, malgré toutes nos tentatives, s’avère impossible : il n’a pas l’IBAN demandé. Et visiblement sa banque non plus !

Jeudi 16 février 2023 : Sajama – 4 200 m d’altitude

Sajama est le nom du village de 300 habitants, du volcan et du parc national, le premier crée en Bolivie, en 1939 afin de protéger la plus haute forêt de Queñuas du monde.

Le climat de la région est froid et semi-aride, empêchant l’agriculture. Il y a beaucoup d’élevage de lamas sur ce haut plateau, l’altiplano, balayé par le vent.

La température moyenne est de 7,5° en cette saison et négative durant la nuit.

Au lit, sous toutes les couvertures, on se croirait sous une chape de plomb. Mais nous dormons bien.

Après un bon petit déjeuner, nous partons à pied, aux eaux chaudes, à 6 km de là. Heureusement, le terrain est pratiquement plat, car je m’essouffle facilement.

Le paysage est absolument magnifique : un immense plateau entouré de montagnes aux sommets enneigés dont le plus haut de Bolivie, le Sajama, qui culmine à 6 542 m.

Cette nature si vaste semble encore sauvage.

Les nombreux troupeaux de lamas paissent tranquillement.

Nous arrivons aux eaux thermales, dont le gérant est Adrien, le frère de Téofilo, le chamane. Nous lui avions promis d’aller à la rencontre de son frère.

Quel plaisir de se relaxer après l’effort, dans ce paradis naturel.

Puis encore 6 km de retour avant de déguster un bon repas. La sieste s’impose.

Nous disposons d’une connexion internet, très lente, de 18h à 21h et bien sûr, nous en profitons.

Eliseo nous propose de partir en bus demain matin à 6h. Ce bus passe par Patacamaya, une ville où nous trouverons une banque pour retirer de l’argent. Et donner cet argent dû à Eliseo au chauffeur qui le lui rendra. Puis de là, prendre un bus pour Oruro.

Ainsi, grâce à sa confiance, au lieu de payer Eliseo au moment de partir, c’est lui qui nous avance de l’argent pour continuer notre route !

Nous nous sentons moins mal en lui signant une reconnaissance de dette en bonne et due forme.

Vendredi 17 février 2023 : Sajama – Oruro : 313 km

Lever 5h, une nuit agitée, nous avons froid et dormons tout habillés, Hélios est soucieux que nous puissions vraiment retirer de l’argent.

Le chauffeur a été brifé par Eliseo, et tout se passe comme prévu : ouf !

Oruro est à 3 735 m d’altitude. Nous sentons la différence de climat, beaucoup plus modéré ici.

C’est la 5ème ville du pays et compte 270 000 habitants

Tout s’enchaine vite et bien. Un taxi nous emmène à notre logement, près du centre-ville. Notre hôte Renato nous accueille et se charge de laver notre linge. Puis il nous guide en ville, pour nous aider à choisir des places de choix sur des gradins pour assister au carnaval, les 2 prochains jours. Vraiment des gentillesses que nous accueillons avec gratitude.

Enfin, nous allons nous restaurer au marché.

La ville est déjà en effervescence, avec une forte densité de population, des orchestres qui jouent, ici et là.

Le centre ressemble à un immense marché, les commerçants en tous genres, profitent au maximum de cet afflux considérable de touristes venus du monde entier pour assister et participer aux festivités.

La ville est reconnue comme la capitale du folklore Bolivien. Son carnaval est le second le plus important d’Amérique Latine, après Rio de Janeiro et le plus grand évènement culturel annuel de la Bolivie.

Pour nous, les différences entre ce que nous vivons chaque jour sont énormes et nous demande beaucoup d’adaptation, tant physique que mentale.

Aussi, ce soir, nous sommes crevés !